JUDE&AARIC

Ce soir, j'étais triste et me faisais légèrement chier. C'était samedi, et aucune fête n'avait lieu, surprenant. Je savais que si j'allais rester encore une minute de plus dans mon appartement minable, j'allais devenir lassée et maussade pendant une bonne semaine ! L'idée de bouffer un week-end m'insupporte. Alors tranquillement je réfléchissais à ce que j'aurais pu faire avant de finir cloitrée dans mon lit. L'idée ne fit qu'un tour dans ma tête. Je m'empressai de prendre mon sac et mes clefs, puis fila en direction du bar le plus connu de la ville. C'est ici qu'on faisait des rencontres sympas, il y avait tout pour ne pas commettre l'erreur de se suicider un samedi soir. De plus, ce petit bar réputé n'était pas loin de mon logement, je pouvais donc m'y rendre facilement. Après avoir retiré les clefs du contact, je sortis de la voiture et la ferma à double-tours. Je pris soin de prendre une certaine grâce pour marcher, même si ce type de fréquentation s'en foute royalement. C'était tout de même plus fort que moi, d'un geste décisif, je remis mes cheveux en place pour ensuite pousser la porte du bistro. Il n'était pas blindé comme à son habitude. On pouvait y voir une réunion de clochards à droite, une femme accompagnée d'un beau jeune homme brin. On distinguait également un groupe d'adultes, suivis de leurs enfants se distrayant au baby-foot. Et puis il y avait un homme seul, l'air désespéré. Il ne tirait pas bonne mine. Ne voyant personne aux tabourets du bar, je saisi l'occasion pour prendre place sur l'un de ceux-ci. De suite, un serveur s'adressa à moi pour se soumettre à mes exigences. « Un coca. Euh non..un whisky. Tout compte fait, je vais prendre un verre de vodka. » J'étais gênée par mon air indécis, le serveur le semblait aussi. Mais c'est avec un sourire forcé qu'il m'apporta mon verre. Je le bu d'un trait, sans réfléchir. J'avais grand besoin de me changer les idées, me vider la tête. Et même si je m'étais levée du pied droit, j'avais passé une très mauvaise journée. Je m'efforçai à ne pas penser à mes misères quotidiennes puis commanda un, puis deux, puis trois autres verres. Je tenais plutôt bien l'alcool remarquais-je.

Un jeune homme prit place sur le fauteuil voisin. Son visage ne m'était pas étranger, je l'avais déjà remarqué à peine entrée dans le bar. Il avait l'air plutôt propre sur lui, mais avec un air de désespoir qui ne me laissa pas indifférente. Au lieu de l'entêter avec mes questions psychologiques, je simula un sourire qui était une sorte de petit accueil. Il me rendit la pareille, avec un petit rire en coin délicieux. Il avait une bouche parfaite et des yeux magnifiques. Je ne cessai de décrocher mon regard de ceux-ci. Jusqu'à ce qu'il pouffa de rire tout en ordonnant au serveur de nous apporter la bouteille. Je ne le connaissais pas encore, mais il me paraissait plutôt bon, et même si je mourais d'envie de lui demander pourquoi était-il là, et lui sortir mon grand discours spécial homme pathétique, je m'abstenais, et tenta un maximum de profiter de la soirée qui m'était offerte en compagnie d'un adorable jeune homme. Après tout, qui refuserait ça hein ? J'avais tout à coup laisser prendre place à un sourire béat, ce gars me fascinait. Il me fixait de manière vivante et obsessionnel. Quelque chose me faisait penser que nous allions bien nous entendre. Et même si j'étais bien trop remplie pour comprendre ne serais-ce qu'un mot, je savais que j'allais me rappeler de sa tête au lendemain, de chaque détail, jusqu'aux contours de ses yeux. Je décida donc d'entamer le dialogue, et posa la question la plus banale qu'il soit dans cet endroit. « Alors, qu'est-ce qui t'amène vieux ? »